La BM du Seigneur (Jean-Charles Hue)

Des gens du voyage picards : ils sont blancs et trimballent un accent dégueulasse. Caméra embarquée au milieu des caravanes, on prend le train en marche. Un jeune con dans sa bagnole enchaîne les tours de camping à fond la caisse. Accélérations, dérapages à peu près contrôlés, l'inconscient fait peur à tout le monde. Un des "vieux" pète un câble et déboule le fusil à la main, prêt à "envoyer le cousin au cimetière".
Finalement, il demandera à son deuxième rouquin de fils, Moïse, d'aller se friter à sa place, histoire de laisser ça aux jeunes et de ne pas décimer une famille entière pour deux broutilles.

Ils sont tous chauds et fiers. Ils ont beaucoup de gueule et une façon de parler assez déstabilisante ("mon copain" à toutes sauces, "ben alors, je fais ça que je veux moi", "ma couille",...). En réalité, on a du mal à distinguer ce qui est emprunté aux locaux de ce qui appartient réellement à cette communauté. Un mélange sympa..
Une tranche de vie : ça s'embrouille, ça règle ça avec virilité, honneur, respect des traditions et loyauté (à tout prix). Puis, les scènes qui suivent, on les voit déconner tous ensemble, plus soudés que jamais. Tout est oublié, dépassé. Tous unis, c'est la règle. L'équilibre est là, solide et institutionnalisé.

Ils vivent sobrement, magouillent pas mal. Fred, le costaud de l'affiche, pique des bagnoles. Il fait ça bien et souvent. Un beau matin, ce colosse à la voix douce raconte avoir croisé un envoyé de Dieu. À l'écouter, ce dernier lui aurait confié la garde d'un chien errant, une espèce d'ange canin. Voyant ça comme un avertissement divin, il s'empare du clébard et décide de lever le pied puis de se ranger. Plus de bringues, plus de larcins, on ne déconne plus. Un truc qui, manifestement, ne se fait pas trop par ici.

Les scènes bluffantes s'enchaînent. Les discussions, intéressantes ou pas, captent l’œil et l'attention. Rien ne sonne faux, le mec a fait le choix de l'authentique. Très bonne idée. La baston (à t'en filer le trac, voir extrait 2), les embrouilles (dont celle dans la bagnole entre Fred et son "copain", voir extrait 1), le fantasme d'un bon McDo, ou encore le récit dingue d'un oracle hors normes ("déjà, quand je le prends, quand je le lève, que je le secoue là [le messie], je sens aucune méchanceté"), on jubile, on gobe, on en veut encore.

Quelques extraits :